Avec les années de pratique, la saturation guette. Comment éviter la surcharge physique et mentale ? Une vie de sportif de compétition jusqu’à 19 ans, une autre passés les 35 ans: une longue période de pratique sportive en dilettante entre les deux.
Interview donnée fin 2008, mais toujours d'actualité pour ceux qui prennent de l'âge.
Non, pas vraiment au niveau physique. Avec les années je perds toutefois en vitesse de course, surtout que je ne peux la travailler pour la conserver à cause d'une certaine fragilité musculaire. Je remarque aussi que la transition après la saison de ski alpinisme et la reprise de la course à pied devient chaque année plus difficile. Sans la disponibilité de mon physio (Medsport), cela serait carrément impossible.
En 2021 le discours est plus nuancé: mes possibilités physiques sont hors normes compte tenu de mon âge mais évidemment inférieures à celles au moment de l'interview en 2008.
Plusieurs éléments peuvent l’expliquer: ma croissance très tardive lors de l’adolescence (à 18 ans j’en paraissais nettement moins), la pause effectuée pendant plus d’une décennie, mon hygiène de vie saine et la prudence dans mon approche de l’effort. J’ai encore faim et je ne me sens pas usé physiquement. Mais surtout: j'aime l'effort physique, transpirer !
Toujours aussi vrai aujourd'hui:-)
J’ai appris à écouter mon corps. Si je me sens fatigué, je diminue l’intensité et le volume de mes sorties. Je privilégie les séances légères aux séances dures ou longues, convaincu que la fréquence est primordiale et qu’il vaut mieux être un tantinet sous-entraîné que le contraire. Je ne participe qu’à une quinzaine de compétitions par année. Pour durer, je pense que c’est une bonne recette.
Vouloir et pouvoir ne sont pas toujours synonymes. Je serais satisfait de maintenir mon niveau de forme en 2009. Je peux cependant mieux réussir les grands championnats internationaux qu’en 2008 si je suis épargné par les pépins de santé lors des moments clé.
Difficile à dire, je ne planifie jamais plus loin qu’un an, de saison en saison en fait. J’arrêterai quand je sentirai que c’est le moment.
A la base, mes grosses capacités physiques avec un moteur hors normes utile dans toutes les disciplines d'endurance. Avec l’âge, la connaissance des vraies valeurs de la vie qui relativise les résultats bruts ; l’expérience qui permet d’éviter de grosses erreurs dans la phase de préparation et lors des compétitions. Mon indépendance: je compte avant tout sur moi-même, la seule aide externe dont je bénéfice est la disponibilité de mon physio (un ami) en cas de besoin.
Une fragilité musculaire qui m'est un peu préjudiciable en saison de course à pied. Une prudence toujours plus importante dans les descentes en ski alpinisme. Sinon les désavantages sont plutôt liés à mon statut d'amateur vis à vis de concurrents qui bénéficient de grandes facilités de la part de leurs employeurs (souvent l'armée ou l'Etat): peu de temps à consacrer à la technique, pas toujours un matériel compétitif en ski alpinisme, impossibilité d'aller reconnaître les parcours avant les compétitions, peu de possibilités de régénération.
En fait, il y a 2 obstacles majeurs: l'engagement professionnel à 100%, avec ses responsabilités, qui épuise et empêche de me préparer correctement; la chimie auquel certains recourent pour compenser leur manque de talent et/ou soif de gloire.
Depuis l'arrivée du COVID en mars 2020, j'ai enfin plus de temps pour m'organiser professionnellement notamment en limitant les déplacements. Du coup, j'ai aussi plus de temps pour m'entraîner et récupérer: cela se ressent dans ma forme physique.
Quelques conseils à donner sur l'entraînement?
Pour ceux qui, comme moi, travaillent à temps plein et ne recourent pas à la médecine je dirais de suivre l'adage "qui veut aller loin ménage sa monture". Concrètement, cela signifie: écouter son corps, s'octroyer suffisamment de repos, s'entraîner de manière consciente tout en laissant place à de l'improvisation afin de ne pas s'ennuyer. Bref, ne pas trop en faire et surtout pas trop durement. Les 60 à 80% de mes entraînements, selon les saisons, s'effectuent à moins de 130 pulsations/minute.
Et en général?
Veiller à une alimentation saine et équilibrée. Je mangeais n'importe comment pendant des années avant de prendre la chose au sérieux. A cet égard, j'ai donc progressivement changé mon alimentation au fil du temps: plus de fruits et légumes, moins de protéines animales.
Des choses à éviter?
Beaucoup de sportifs, d'élite ou du dimanche, s'entraînement de manière trop intensive et finissent par s'épuiser. Mais il faut distinguer: celui que ne travaille pas ou peu pourra sûrement rajouter un peu de volume et d'intensité. Et tout ce que je vous dis n'a aucune valeur au regard de ceux qui prennent des potions magiques: outre l'amélioration de la performance, à l'évidence certaines formes de dopage améliorent considérablement la récupération. La littérature scientifique et les témoignages de "repentis" convergent sur ce point. C'est pourquoi vous verrez des athlètes cumuler volume et intensité presque quotidiennement. Mais ne vous en inspirez pas, sans quoi vous allez au-devant de cruelles désillusions!
Depuis que je suis membre de la communauté Strava (2020), je constate qu'il existe des sportifs "amateurs" qui s'entraînent 4 à 5h par jour en moyenne avec des intensités plusieurs fois par semaine. Sans chimie, je ne crois pas qu'il soit possible de récupérer d'une telle débauche d'énergie!
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